N. Lygeros
Erol Özkoray n’est pas seulement un journaliste ou un  intellectuel,  c’est un véritable combattant de la paix au sens d’Albert Camus.  Son  livre n’est pas un simple  pamphlet  mais un acte d’accusation. À  l’instar d’Émile Zola, il n’a pas le pouvoir de  condamner aussi en tant  que juste il accuse. Il montre aussi que l’Union  Européenne a joué un  rôle catalytique dans l’apparition du « régime caché », du  « totalitarisme  sournois ». Il démontre par un raisonnement par  l’absurde que la Turquie  n’est ni un pays républicain et laïc, ni un  pays musulman modéré malgré les  dires du monde extérieur. Car il n’est  pas dupe quant à la politique de  dissimulation du gouvernement. Il sait  que le vrai pouvoir est détenu par les  militaires. Son analyse de  l’enquête sur Ergenekon est limpide et précise. Il  en est de même quant  aux détours artificiels empruntés par l’appareil de  justice pour  exploiter l’esprit sans la lettre de l’article 301 du Code Pénal  qui  réprime toute critique de la nation turque et de son armée. Il explicite  la  nature de ce régime totalitaire sournois, de ce fascisme alla turca,  sans  manquer de mettre en exergue le problème de l’existence  antinomique du Conseil  National de Sécurité dans une prétendue  démocratie. Non sans sarcasme, il  dénonce ce pentagone civil high tech  qui n’est rien d’autre, selon ses propres  termes, que la Mecque du  totalitarisme turc. Il n’hésite pas à énumérer les  cibles des sept  coups d’état avortés entre 2002 et 2009 : Kurdes, Alévites,  Arméniens,  islamistes, démocrates, socialistes, libéraux et partisans de  l’Union  Européenne. Aussi nous comprenons qu’en Turquie, le peuple n’est pas une   population mais un nid de suspects pour le   régime en place, en   d’autres  termes  l’état profond. Le propriétaire du  pays n’est nul  autre que l’Armée qui fait et défait les crises internes  et externes à  son gré pour montrer sa toute puissance face aux civils. Sa  stratégie  est efficace et la Grèce en est une des victimes grâce aux points   litigieux à savoir : Chypre, la délimitation du plateau continental,   l’utilisation de l’espace aérien sur la mer Égée, la militarisation des  îles  grecques, la minorité musulmane en Grèce et le statut œcuménique  de l’Église  orthodoxe à Istanbul. Et à la base de cette stratégie de la  crise artificielle,  nous trouvons le dogme fondamental et sans cesse  réitéré par tous les  gouvernements : face au problème kurde,  aucune  fragmentation, face au  problème chypriote, aucune concession,  face au génocide des Arméniens, aucune  reconnaissance, face à l’Église  orthodoxe, aucune place, enfin, la laïcité ne  doit pas être touchée.  Conscient de son rôle de juste, Erol Özkoray dénonce non  pas uniquement  les inepties sur l’encerclement de la Turquie par la Grèce, mais  aussi  le non-dit contre la politique européenne. Il explicite que ce fascisme   de gauche, selon Pierre Milza, qui a rejeté l’histoire ottomane pour  suivre le  principe d’Hitler qui affirmait que l’état allemand n’avait  pas de passé, a  réussi à transformer la société via l’éducation et les  médias, en une entité  fasciste, raciste, xénophobe qui croit à la  suprématie de la race turque. Et  même, si selon Orwell, il est  difficile de prévoir la fin des dictatures  modernes, Eroll Özkoray  n’hésite pas à écrire que si les choses dégénèrent, la  Turquie pourrait  être la Yougoslavie du XXIe siècle. Il ne joue pas le rôle du   prophète, pas même celui de Cassandre mais il regarde lucidement le  futur de  son peuple et ne peut s’empêcher de prévenir les hommes libres  pendant qu’ils  le sont encore, qu’un pays qui n’a pas de passé, est  aussi un peuple qui n’a  pas d’avenir. Voilà pourquoi la lecture de ce  livre est une nécessité pour les  combattants de la paix. 
 
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